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La neutralité a ses exigences. Comment souhaiter une bonne année à la France, sans paraître souhaiter une mauvaise année à l’Allemagne ?


Mercredi 30 décembre

Le prince régent de Serbie nous exprime le désir de recevoir le plus tôt possible de nouvelles munitions. Il sollicite, en même temps, trois batteries de montagne, sans lesquelles, dit-il, l’offensive ne pourrait que difficilement être reprise en Bosnie. Le régent se montre préoccupé de la possibilité d’une nouvelle attaque autrichienne. La nomination d’un archiduc au commandement de l’armée qui doit opérer contre la Serbie lui fait supposer que l’Autriche est décidée à tout tenter pour essayer de réparer sa récente défaite25. Ainsi, de quelque côté que nous tournions les yeux, l’année nouvelle nous apparaît enveloppée de brume et chargée d’inconnu.

M. Tittoni a dépensé d’étonnantes ressources d’habileté à essayer de justifier auprès de Del-cassé l’occupation de Valona. Il a émis, en même temps, l’opinion qu’Essad Pacha, violemment combattu dans Tirana, son propre fief, par les efforts combinés des Turcs et des Autrichiens, se trouve dans une position très critique. « Et s’il vous appelle à son aide ? a demandé M. Delcassé. — Nous ne bougerons pas, a répondu M. Tittoni. Je l’ai dit et répété à Rome ; il ne faut pas que notre détachement de marins s’aventure au delà de la portée des canons de l’escadre. En Albanie, l’engrenage est particulièrement à redouter. Or, nous ne voulons pas être engagés d’un côté, au