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xi
préface

tances passives ; c’est à eux que nous devons l’organisation du cosmos.

Et alors une réflexion s’impose ; on admet en général que les atomes ne sont soumis à aucune résistance passive, de sorte qu’ils se comportent dans le choc comme des corps élastiques ; ils suivent ainsi sans restriction les lois de la Mécanique théorique. Si les corps de dimension sensible semblent s’en écarter à tel point que les phénomènes observés sont irréversibles, c’est qu’ils se composent d’atomes très nombreux et que la loi des grands nombres intervient. Cela va bien si les atomes sont eux-mêmes regardés comme des points matériels et si le mot « atome » doit être entendu au sens étymologique ; mais il est loin d’en être ainsi ; les éléments d’un gaz dans la théorie cinétique sont les « molécules » et chacune d’elles contient plusieurs atomes chimiques ; chaque atome à son tour est formé d’électrons, et il serait puéril de supposer qu’on n’ira jamais plus loin et que les électrons ne se résoudront pas un jour en éléments plus petits. Une molécule ou un mot est un édifice aussi compliqué que le système solaire ; ses éléments ultimes très nombreux doivent obéir à la loi des grands nombres, de sorte que dans l’intérieur de l’atome lui-même, il y aura des résistances passives. Ne pourrait-on concevoir que ces résistances jouent le même rôle que dans la théorie de M. du Ligondès et ne pourraient-elles tendre à produire la différenciation à l’encontre du principe de Carnot ?

Dans la théorie de M. See, les planètes ne se sont pas détachées du Soleil, non plus que la Lune de la Terre. Tous ces astres ont eu de tout temps une existence individuelle.

Les planètes ont été captées par le Soleil et la Lune par la Terre. Comment s’est faite cette capture ? Le Soleil était autrefois entouré d’une atmosphère ; dès qu’un astre vagabond y pénétrait, il éprouvait une résistance ; son orbite, d’abord hyperbolique devenait elliptique par suite de la diminution de vitesse ; puis elle se rapprochait de la forme circulaire, en même temps que son rayon décroissait. L’astre ainsi capté aurait fini par tomber sur le Soleil, s’il avait continué à subir la résistance de l’atmosphère solaire,