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Quand l’univers s’endort dans d’épaisses ténèbres,
Que des torrents lointains on distingue la voix
Et qu’on entend, aux monts, les murmures funèbres
que la nuit pousse au fond des bois ;

Oh ! n’avez-vous jamais, à cette heure suprême,
Marché silencieux près d’un ange qu’on aime ;
Contemplé dans ses traits les vertus de son cœur ;
Ravi dans un baiser, son âme enthousiaste,
Et lu dans ses regards, pleins d’une flamme chaste,
Tout un avenir de bonheur ?

Ou bien, sur quelque mont couronné de nuées,
Où les foudres du ciel cent fois se sont ruées,
N’avez-vous jamais, seul, et le monde à vos pieds,
Scruté l’orageux cours de cette pauvre vie,
Où l’on voit constamment sous le pied de l’envie
Les plus beaux fronts humiliés ?

N’avez-vous pas songé qu’en ces ruches humaines,
Sous ces milliers de toits, souvent de tristes scènes,
Quand, gorgé du festin, le riche est endormi,
Troublaient des nuits d’hiver les heures si tranquille !
N’avez-vous pas songé que, dans les grandes villes,
Vous n’aviez pas un seul ami ?

Et quand votre pensée est rentrée en vous-même,
N’avez-vous pas lancé quelque horrible anathème