Page:Poncy - Poésies, vol. 1, 1867.djvu/161

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
— 93 —

Balance avec orgueil ta sombre majesté
Dans les nuages noirs qui planent sur ta tête

Le grondement de la tempête,
Dont le monde est épouvanté,
N’est pour toi qu’un concert de fête.

Te souvient-il du jour que, pleurant à tes pieds,
Plein des vagues désirs qu’à vingt ans l’àme embrasse,
Mes yeux, mes yeux jaloux y trouvèrent la trace

Des pas qu’ils ont tant épiés ?

Te souvient-il qu’alors, dans la forêt sonore,
Elle nous apparut, belle comme le jour,
Et que je m’écriai, malade et fou d’amour :

Voilà la vierge que j’adore ?

Balance-toi, sublime, et réponds à ma voix,
Patriarche des bois, ô sauvage merveille !

Car ton bruit charme mon oreille :
Et chaque fois que je te vois,
Ce brûlant souvenir s’éveille.

Depuis ce jour sacré qui fixa mon destin
Quatre fois le printemps a changé ton feuillage.
Tous les soirs tu m’as vu rêver sous ton ombrage :

Et souvent les feux du matin,

Lorsque la nuit replie en silence ses voiles,
M’y surprennent, mouillé des larmes que le ciel