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Sur tes bordages elle roule ;

Et la poix enflammée en pluie ardente coule.

À voir, mouvant et replié,

Ton panache de feu dans l’air multiplié,

Et l’affluence de la foule,
On te croirait incendié.

Déjà la flamme diminue.

Elle ne courbe plus sur ta carcasse nue

Sa crinière de vermillon.

La fumée, en courant, trace son noir sillon

Et sur la robe de la nue
Lance son dernier tourbillon.

On garnit les échafaudages

Du mets dont Robinson régala les sauvages :

Les calfats puisent au chaudron

Un liquide plus noir que l’eau de l’Achéron,

Et dans les joints de tes bordages
Font pleuvoir des flots de goudron.

De tes liens te voilà libre !

D’une poulaine d’or on couronne ta guibre.

D’habiles peintres, sur ton corps,

D’un navire de guerre imitent les sabords,

Et de tes fils le chant qui vibre,
Apprend que tu vas fuir nos bords.