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Donnez aux bons vieillards que le faix des ans courbe
Un grabat et du pain, un âtre et de la tourbe ;
Tendez des bras sauveurs au génie abattu ;
Encouragez les arts, soutenez la vertu ;
Et le pauvre, accroupi contre la froide borne,
Qui regarde vos chars voyageurs d’un œil morne,
Qui souffre en même temps et la faim et le froid,
Ne s’écrira jamais, dans son horrible effroi :
« Quand chaufferai-je donc ma poitrine engourdie
Au seuil de leurs palais fumants sous l’incendie ?
Quand reviendront ces jours de suprême courroux
Où l’or, la liberté, le pouvoir sont à tous ? »

Oh ! faites travailler le père de famille
Pour qu’il puisse abriter la pudeur de sa fille :
Pour qu’aux petits enfants amaigris par la faim,
Il puisse rapporter, non des pleurs, mais du pain :
Pour que sa pâle épouse au désespoir en proie,
Se ranime à sa vue et l’embrasse avec joie :
Pour qu’avec le remords, à vos chevets, le soir,
Les morts que vous craignez ne viennent pas s’asseoir ;
Pour éloigner de vous les sanglantes tempêtes
Qui menacent encor d’éclater sur vos têtes :
Et pour que Dieu, surtout, à vos derniers moments,
Vous pardonne votre or et vos enivrements.



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