Page:Pons - Sainte-Beuve et ses inconnues, 1879.djvu/204

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mon rêve, je le presse, je le force à s’expliquer et à se définir : cette femme, dont le fantôme agite l’approche de mon dernier printemps, est une toute jeune fille. Je la vois, elle est dans sa fleur, elle a passé quinze ans à peine ; son front, plein de fraîcheur, se couronne d’une chevelure qui amoncelle ses ondes, et qui exhale des parfums que nul encore n’a respirés. Cette jeune fille a le velouté du premier fruit. Elle n’a pas seulement cette primeur de beauté ; si je me presse pour dire tout mon vœu, ses sentiments, par leur naïveté, répondent à la modestie et à la rougeur de l’apparence. Qu’en veux-je donc faire ? Et si elle s’offrait à moi, cette aimable enfant, l’oserais-je toucher, et ai-je soif de la flétrir ? Je dirai tout : oui, un baiser me plairait, un baiser plein de tendresse ; mais surtout la voir, la contempler ; rafraîchir mes yeux, ma pensée, en les reposant sur ce jeune front, en laissant courir devant moi cette âme naïve ; parer cette belle enfant d’ornements simples où sa beauté se rehausserait encore, la promener les matins de printemps sous de frais ombrages et jouir de son jeune essor, la voir