Et maintenant, l’on s’empresse autour de la victime. On la déshabille et on la frictionne. Enfin, une goutte de cognac que l’on verse dans la bouche contractée du Premier le ramène définitivement à la vie.
« Il a eu plus de peur que de mal », heureusement, déclare, encourageant, M. Lepire.
— Je savais, je savais, murmura, inspiré, le Secrétaire Provincial, qu’il arriverait un malheur…
— Alors pourquoi ne pas nous avoir prévenus ? fait, de méchante humeur, le ministre des Forêts.
— Heureusement que nous étions là, fait remarquer le ministre des Travaux Publics.
Maintenant, le premier ministre peut se lever et parler.
« Ah ! j’ai bien cru que j’allais mourir, mes vieux, et j’ai traversé un moment d’angoisse terrible. Tenez !… j’ai eu la perception très nette que je me noyais…. Mes tempes se gonflaient à éclater, mes oreilles bourdonnaient et… et c’était comme un grand trou noir dans lequel je m’engouffrais… mon cœur était serré comme dans un étau et il s’arrêtait de battre…
« C’est terrible ! » murmurèrent les collègues.
— N’importe, ce que c’est de nous, murmura encore le Premier, en se regardant encore tout ruisselant … Mais savez-vous, mes vieux, que j’ai l’air d’un pingouin ? À propos, mon sauveur, où est mon sauveur ?…
« Monsieur Mansot ! » crièrent les ministres.
Mais Donat Mansot se dirigeait déjà vers la station, de cette démarche véritablement humble d’un homme qui vient de jouer avec la mort et avec la gloire.