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LE « MEMBRE »

Beaupré… L’air semble se faire plus doux à mesure que s’approchent l’âpreté des froids d’hiver et les premiers flocons de neige qui tomberont peut-être demain. Une minute, les deux jeunes gens s’abandonnèrent à cette douceur de vivre qui vient de toutes les choses ambiantes pendant ces crépuscules de l’« été des sauvages ».

Puis, comme s’il continuait un rêve qu’il eût, un instant, interrompu, Octave Lamirande mi-sérieux, mi-gouailleur, continua :

« Elle nous dit, la petite lumière qui brille au sommet de la grande tour de l’édifice du Parlement : « Habitants des villes, dormez, ceux que vous avez choisis pour vous gouverner, veillent. Dormez, habitants des bourgs, dans vos taudis froids et humides, peut-être le charbon et le bois manquent-ils, peut-être vous demandez-vous, en attendant le sommeil qui ne vient pas, s’il y a du pain encore pour le déjeuner, dormez, vos gouvernants veillent !… Dormez, vous, là-bas, pauvres et rudes colons, dans vos huttes de bois rond ; il est vrai que si, demain, vous n’êtes pas en règle avec les douces lois de la colonisation, vous pouvez préparer le coffre de bois et filer aux États-Unis, mais, au nom de ceux-là dont j’annonce les labeurs nocturnes, je vous dis ; restez et dormez ! On vous a promis des millions pour vos routes, qu’avez-vous besoin, après cela, de vos terres et de votre camp ? Dormez, cultivateurs que les lourds travaux de la ferme ont harassés, qui rêvez de fructueuses moissons et d’odorantes prairies, ceux qui vous gouvernent ont décidé que la culture de la betterave aura leurs plus