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LE « MEMBRE »

Mandarin » ? Supposez que pour devenir l’héritier d’un homme immensément riche, dont vous n’avez jamais entendu parler et qui habite le fin fond de la Chine, vous n’ayez qu’à pousser un bouton pour le faire mourir… pousseriez-vous le bouton ? Tueriez-vous le Mandarin ?

— Pourquoi pas ? répondit froidement Donat Mansot. Nous commettons tous les jours, nous les hommes publics, des actes cent fois pires que cet assassinat très automatique du Mandarin, et cela pour un bien moindre prix.

— C’est une affaire de conscience et… d’habitude, répliqua Lamirande et, ma foi ! dans l’exercice de notre profession d’avocat, je dois avouer que nous commettons, nous aussi, des assassinats de Mandarins, assez régulièrement, et que le Conseil du Barreau ne s’en émeut guère…

La nuit était maintenant tout à fait venue et le petit parc était devenu tout noir. Les becs de gaz s’allumaient par toute la basse ville. Le vent avait fraîchi et il faisait froid. Sept heures sonnèrent au beffroi de l’Hôtel de Ville, et, aussitôt, toutes les cloches de la ville, le gros bourdon de la basilique en tête, répondirent par « l’angelus ».

« Je crois que c’est l’heure de rentrer, fit remarquer l’Américain ; nous grelottons. Il faudra vraiment finir par changer ce climat par trop glacial de Québec, ajouta-t-il en riant… Allons messieurs, je retourne au Château… J’espère que nous nous reverrons. Au revoir, messieurs !…

Les trois hommes se séparèrent