Page:Potvin - Le tour du Saguenay, historique, légendaire et descriptif, 1920.djvu/193

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
148
le tour du saguenay

« J’assistai un jour », racontait le révérend Docteur, « à un « Jubilé » que le Grand-Tronc avait organisé pour solenniser l’ouverture de la ligne. Comme premier fonctionnaire du Conseil au spirituel, ma présence était indispensable, me disait-on. Le vapeur, frété par la compagnie pour ses nombreux invités, les ministres, les députés, etc., était encombré. Comme le trajet, aller et venir, devait durer plus d’une journée, on en vint à redouter une famine. Après une copieuse collation où je fus témoin de l’appétit pantagruélique de tous ces patriotes amis de la ligne, je cherchai un gîte sur l’arrière du vaisseau.

« Il me sembla néanmoins prudent de prendre des précautions contre les éventualités de la route : je mis de côté un colossal « pain de Savoie » et une bouteille de Sillery mousseux — "cachet vert”. Cette réserve, je la déposai discrètement sous mon oreiller : puis, je m’endormis d’un profond sommeil, doucement bercé dans mes rêves par des visions des « dividendes » et des profits fabuleux que se partageraient, plus tard, les actionnaires de la Compagnie. Passe un membre de l’opposition : j’ai toujours cru depuis que ce dût être le fameux Wm-Lyon Mackenzie. On avait résolu de me faire pièce. Bientôt je sentis qu’une main sacrilège, se faufilant sous mon oreiller, tentait de s’approprier la « réserve » que j’y tenais en séquestre : « Gare à vous, profane », lui criai-je, « ce sont les Réserves du Clergé ! »

« Le mot spirituel du docteur », ajoute sir James Lemoine « me fit réfléchir que ces réserves du domaine de la couronne, bien qu’affectées au maintien du clergé, étaient exposées à être « sécularisées » comme le « pain de savoie » et le champagne du Dr Adamson. La Légis-