Page:Procès-verbal de la Commission Municipale du Vieux Paris, 1899, 5.djvu/18

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23 juin 1554 ; la voie qu’il bordait existait déjà en 1380 et ne fut seulement pavée qu’après 1650, sur une largeur de 10 toises. En cet endroit, le plan de Verniquet l’indique sous le nom de quai des Miramiones. Il avait reçu cette dénomination en souvenir du couvent des dames Miramiones qui y fut établi en 1670 ; les bâtiments en sont aujourd’hui occupés par la Pharmacie centrale des hôpitaux.

En continuant la percée du souterrain, les fouilles ont traversé en écharpe l’ancien parapet du quai de Montebello, à hauteur de l’entrée de la rue des Grands-Degrés, dans la galerie du piédroit de gauche, et l’ont poursuivi dans la même direction oblique, sur une longueur de 130 mètres, jusqu’à la rencontre de l’ancien pont au Double, dans la galerie de droite. Plusieurs anneaux d’amarre ont été aussi rencontrés sur son parement, du côté de l’eau. Cet ancien mur de quai datait de 1817 ; en ce temps-là, la partie du quai de Montebello qu’il longeait s’appelait quai de la Bûcherie. Avant le xviie siècle les habitations qui s’y alignaient tournaient le dos à la rivière et avaient leurs entrées rue de la Bûcherie, comme il en subsiste, du reste, encore quelques-unes.

En abordant les restes de l’ancien pont au Double, on a pu constater que celui-ci se trouvait à 21 mètres en amont du nouveau et comportait, en dessous du quai actuel, une arche que les déblais du souterrain ont traversée et mis à découvert. Cette découverte indique certainement que la Seine devait autrefois s’étendre jusque-là, ainsi qu’en témoignent d’ailleurs quatre anneaux d’amarre retrouvés scellés aux parois de cette arche.

Construit, en 1634, par l’architecte Gamart, l’ancien pont au Double fut d’abord destiné à supporter une annexe nouvelle de l’Hôtel-Dieu, dont les vieux bâtiments étaient devenus plus qu’insuffisants. Cette annexe fut désignée sous le nom de salle du Rosaire ou de salle Saint-Côme.

A la demande des habitants du quartier de la place Maubert et des rues voisines, on donna assez de largeur à ce pont pour y aménager, le long de la salle du Rosaire, un passage pour lequel, suivant une ordonnance de Louis XIII, les piétons devaient payer un double tournois, d’où la dénomination de pont au Double que lui donna le public et qui lui est restée ; à l’origine on l’appelait le pont de l’Hôtel-Dieu. Bien que ladite ordonnance prescrivît un droit de deux liards pour les cavaliers, ceux-ci n’y passaient jamais, à cause de la raideur de ses montées ; une barrière à tourniquet leur en

interdisait même l’accès. Le seul péage des piétons fut néanmoins assez fructueux pour l’hôpital, car c’était à’ son bénéfice qu’il avait été établi. Voici un exemple de ses résultats. De 1744 à 1764, il a produit une somme de 254, 233 livres, ce qui démontre, ainsi que le fait observer M. Husson dans son Histoire des hôpitaux, que, pendant ces vingt années, il est passé en moyenne 2,825 personnes par jour sur le pont au Double. Lorsque le double tournois cessa d’être en usage, on paya un liard, ce qui augmentait le prix du passage, puisqu’il fallait quatre liards pour faire un sou, tandis que le double tournois, qui valait deux deniers, n’en faisait que la sixième partie.

Le pont au Double partait du coin du jardin de l’Archevêché, où commençait la rue de l’Evêque, et aboutissait rue de la Bûcherie, presque vis-à-vis l’entrée de la rue du Fouarre, par une toute petite ruelle dont il existe encore un tronçon entre les nos 19 et 21 du quai de Montebello.

La salle du Rosaire ayant été démolie en 1835, le pont au Double fut livré à la circulation dans toute sa largeur. De 1847 à 1848 il fut remplacé, au même point, par un pont d’une seule arche, praticable aux voitures. Par suite du prolongement et de l’élargissement de la rue du Fouarre, vers le quai de Montebello, il a été de nouveau démoli en 1876 et reconstruit la même année à 21 mètres en aval de son ancien emplacement.

Au delà du pont au Double, les fouilles du chemin de fer d’Orléans ont mis à découvert, dans la galerie de droite du souterrain, un long mur en pierre de taille muni, de distance en distance, de solides anneaux d’amarre scellés à une face de parement qui regardait, non plus la Seine, mais le côté opposé, c’est-à-dire la partie méridionale de la ville. Ceci nous semble une preuve de plus que des bateaux passaient par l’arche de la culée sud de l’ancien pont au Double, retrouvée ainsi qu’il vient d’être dit, et devaient circuler souterrainement, sous l’emplacement du quai actuel, jusqu’au Petit-Pont.

Maintenant, si l’on jette les yeux sur quelques plans du siècle dernier, il est facile de voir que l’emplacement de ce quai était alors occupé, depuis le pont au Double jusqu’au petit Châtelet, par d’autres bâtiments annexes de l’Hôtel-Dieu, lesquels contenaient les salles Saint-Charles et Saint-Antoine et dont les murs plongeaient à pic dans la rivière. Un pont en pierre, datant du règne de Henri IV et placé sous le vocable de saint Charles,