Page:Proudhon - De la justice dans la Révolution et dans l’Église, tome 1.djvu/100

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police pour les mœurs, d’économie pour les biens, d’éducation pour la jeunesse, de restriction pour les idées, de discipline pour les hommes.

Dans la théorie de l’Immanence, au contraire, la connaissance du juste et de l’injuste résulte de l’exercice d’une faculté spéciale et du jugement que la Raison porte ensuite sur ses actes. En sorte que pour déterminer la règle des mœurs il suffit d’observer la phénoménalité juridique à mesure qu’elle se produit dans les faits de la vie sociale.

D’où il suit que, la Justice étant le produit de la conscience, chacun se trouve juge, en dernier ressort, du bien et du mal, et constitué en autorité vis-à-vis de lui-même et des autres. Si je ne prononce moi-même que telle chose est juste, c’est en vain que le prince ou le prêtre m’en affirmeront la justice, et m’ordonneront de la faire : elle reste injuste et immorale, et le pouvoir qui prétend m’obliger est tyrannique, infâme. Et réciproquement, si je ne prononce dans mon for intérieur que telle chose est injuste, c’est en vain que le prince et le prêtre prétendront me la défendre : elle reste juste et morale, et l’autorité qui me l’interdit est illégitime et odieuse.

Tel est le Droit humain, ayant pour maxime la Liberté : de là aussi tout un système de coordination, de garantie réciproque, de service mutuel, qui est l’inverse du système d’autorité.

XII

Est-il besoin d’ajouter que dans cette théorie, l’homme devant arriver par lui-même et par lui seul à la connaissance de la Justice, sa science est nécessairement progressive, qu’elle se révèle à lui à fur et mesure de l’expérience, à la différence de la science révélée, donnée en une fois, et à laquelle nous ne pouvons ajouter ni retrancher une lettre ?