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XXXII

Propriétaires et Locataires.

Puisque je vais parler de la propriété, qu’on me permette d’abord de vider une question de propriété. Il s’agit d’un fait personnel.

J’ai écrit quelque part, tout le monde le sait : La propriété, c’est le vol ; et plus tard, je ne saurais dire où, car je ne me relis point : « Cette définition est mienne ; je ne la céderais pas pour tous les millions de Rothschild. »

Or, voici que Louis Blanc et Daniel Stern, le premier dans son Histoire de la Révolution Française, le second dans son Histoire de la Révolution de 1848, me reprochent d’avoir volé cette définition à Brissot de Varville, le chef du parti girondin. C’est Brissot, que je n’ai pas lu, qui aurait dit le premier : La propriété, c’est le vol !

De par le tribun et la femme savante, je suis atteint et convaincu d’avoir brissoté Brissot. Deux mots faisaient ma gloire, elle m’est ravie. Il ne me reste que la honte du plagiat.

Hélas ! qu’on dit bien vrai, qu’il n’y a rien de nouveau sous le soleil ! Encore un peu, et je me vois dépouillé de toutes mes plumes. Le crédit réciproque ne m’appartient plus ; la banque du peuple, cette pauvreté, selon Daniel Stern, on vient de découvrir qu’elle est de l’invention de Napoléon Ier; le crédit gratuit, cette folie, selon M. de Lamartine, à laquelle commencent à venir les adhésions en France et à l’étranger, se retrouvera tôt ou tard dans Ricardo ou quelque autre juif ; l’anarchie a été aperçue partout. Pauvre Érostrate que je suis ! quel temple d’Éphèse me reste-t-il à brûler, pour que la postérité parle de moi ?…

Mais le propriétaire, précisément parce qu’il est voleur, ne se laisse pas dessaisir : son instinct de rapine le lui