Page:Proudhon - De la justice dans la Révolution et dans l’Église, tome 1.djvu/37

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quintessence de Descartes. Raphaël, avec ses vierges, ne proteste pas moins contre le christianisme que Luther avec son libre examen. Sous Louis XIV, les gens de lettres, chrétiens par leur baptême et dans leurs prières, communient avec l’antiquité païenne. Par la résurrection des anciens et la transfusion des muses grecques et latines dans notre idiome, ils fondent la catholicité littéraire, catholicité merveilleuse, qui admet toutes les langues, tous les styles, toutes les idées, tous les génies, toutes les races, toutes les époques, et de tant de productions diverses, fait une même et universelle littérature ! L’Église a-t-elle triomphé de la Renaissance ?

D’après les lois qui régissent les êtres organisés, l’Église devrait avoir péri mille fois. Que lui reste-t-il de tout ce que pouvait atteindre la spontanéité de la conscience, l’indépendance de l’esprit, la souveraineté des nations, la puissance des empereurs et des rois ? Elle a tout perdu, et ce misérable domaine qu’elle tint jadis de la dévotion d’une princesse, ce pauvre héritage de saint Pierre, lui est encore disputé.

Et cependant l’Église résiste à toutes les attaques, elle survit à tous les schismes, à toutes les hérésies, à tous les démembrements, aux institutions de saint Louis comme aux libertés gallicanes, à Pothier comme à Descartes, à Luther comme à Voltaire. Elle a survécu à ses propres immoralités ; elle a eu ses pontifes réformateurs longtemps avant la Réforme ; et maintenant que la Réforme n’est plus qu’un mot, le concile de Trente régit sans conteste l’univers orthodoxe. Que dis-je ? à mesure que les Églises plus avancées qu’elle