Page:Proudhon - De la justice dans la Révolution et dans l’Église, tome 1.djvu/447

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verra à l’évêché ; ou bien elle ira elle-même remplir sa mission ; ou bien enfin elle désignera simplement le prêtre prévaricateur à son directeur, avec autorisation de le faire connaître à l’évêque. »


Ainsi la confession, instituée comme moyen de police ecclésiastique à l’égard des laïcs, redevient à son tour moyen de police à l’égard des clercs, par la dénonciation réciproque des uns par les autres. Du reste, il est entendu que la délation s’applique à toute espèce de délit commis par action, par parole, par opinion, et que le nom du délateur doit rester inconnu de l’évêque et du confesseur, aussi bien que du dénoncé. En sorte qu’à la faveur du confessionnal et de la boîte de l’évêché, un individu peut multiplier et varier ses dénonciations contre qui bon lui semble, autant de fois qu’il lui plaît.

J’emprunte les détails qui suivent au prêtre que j’ai déjà cité :

« Une institutrice se trouve enceinte et croit atténuer sa faute en la rejetant sur son curé. Jugement, ou plutôt condamnation du curé. Avant de quitter sa paroisse, il monte en chaire et prend Dieu et les hommes à témoin de son innocence. Quel sacrilége ! donner un démenti à l’infaillibilité épiscopale ! Ce cri d’une conscience irréprochable mit le sceau à la réprobation du pauvre prêtre. Il dut quitter le diocèse et se réfugier dans une contrée étrangère. — Cependant l’institutrice tombe malade ; la peur de la mort rend plus poignant le souvenir de sa calomnie ; elle appelle son confesseur, le même qui, sur sa première déclaration, avait fait un rapport contre le curé, lui avoue son crime. Nouveau rapport du confesseur. Alors l’évêque finit par où il aurait dû commencer : il examine l’affaire, reconnaît l’innocence du proscrit, le rappelle de l’exil et lui confie une autre paroisse.

« — Payez mon boulanger, m’écrivait une femme familiarisée avec les iniquités de la délation, ou je vous dénonce ! — Je possède encore la lettre, et j’ai lieu de me repentir d’avoir traité légèrement la menace de cette malheureuse.