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Dans un tel état de cause, l’athéisme avait raison de soutenir que la Justice est un mot, le bien et le mal des mots ; qu’il n’y a pas d’autre droit que la force, et que tout ce que la théologie et la métaphysique débitent à cet égard est fantaisie pure, logomachie, superstition.

Cependant nous voyons la Justice entraîner l’humanité, produire par son développement la civilisation, élever haut les nations qui l’observent, perdre au contraire celles qui l’oublient. Comment attribuer des effets si puissants, si réels, à une idée sans sujet, à une chimère ?

Pour rendre raison de l’histoire et sauver la morale, pour expliquer la religion elle-même, force était donc de démontrer que la Justice est autre chose qu’un commandement et un rapport ; que c’est encore une faculté positive de l’âme, une puissance de même ordre que l’amour, supérieure même à l’amour, une réalité enfin : et c’est ce que j’ai entrepris dans ces études.

Autre question.

Après avoir reconnu, dans son essence et sa réalité, la Justice, nous nous sommes demandé, passant des personnes aux choses : Quelle est la loi de production et de distribution de la richesse, en autres termes, qu’est-ce que l’économie ? Existe-t-il réellement, peut-il exister une science de ce nom, ayant pour objet une réalité déterminable, possédant des principes propres, des définitions, une méthode ; ou ne faut-il voir dans cette prétendue science que la collection des routines mercantiles et industrielles, de pures manifestations de la liberté, dans lesquelles il serait illogique de chercher une ombre de loi, et qui ne tombent que sous le pouvoir de l’opinion et le bon plaisir du gouvernement ?

Dans ce cas, il est clair que l’économie politique, se résumant en un mot, la liberté, sauf les exceptions qu’impose l’État, n’est point par elle-même une science dans