Page:Proudhon - De la justice dans la Révolution et dans l’Église, tome 1.djvu/496

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par la séparation des industries et la formation du groupe travailleur, on augmente, le nombre des individus restant le même, la production : c’est un effet de la force collective, dont nous avons parlé plus haut. Mais là ne se borne pas l’avantage de cette division. Plus les groupes, en se multipliant, multiplient les rapports de commutation dans la société, plus le nombre des objets utiles et leur utilité elle-même augmentent. Or, cet accroissement d’utilité, qui résulte, à territoire égal, et la quantité du service effectif ne changeant pas, du rapport des groupes, qu’est-ce autre chose que de la rente ? Donc, création de richesse, création de force.

sûreté générale. Dans une population antagonique, telle qu’elle existait au moyen âge, l’Église a beau faire entendre ses menaces, les tribunaux étaler leurs supplices, les rois et leurs soudards faire sonner leurs lances sur les dalles de leurs casernes, la sécurité est nulle. La terre se couvre de donjons et de forteresses ; tout le monde arme et s’enferme ; le pillage et la guerre sont à l’ordre du jour. On accuse de ce désordre la barbarie du temps, et l’on a raison. Mais qu’est-ce que la barbarie, ou plutôt qui la produit ? L’incohérence des groupes industriels, d’ailleurs en très-petit nombre, et l’isolement dans lequel ils agissent, à l’instar des groupes agricoles. Ici donc, le rapport des fonctions, la solidarité d’intérêts qu’elle crée, le sentiment qu’en acquièrent les producteurs, la conscience nouvelle qui en résulte, font plus pour l’ordre public que les armées, la police et la religion. Où trouver une puissance plus réelle et plus sublime ?…

Il suffit de ces exemples pour expliquer ce qu’est en soi le pouvoir auquel donne lieu la collectivité sociale. C’est à l’aide de ce pouvoir, converti en impôt, que les princes se procurent ensuite la gendarmerie et tout l’appareil de coercition qui leur sert à se maintenir contre les attaques de leurs rivaux, souvent contre le vœu des populations elles-mêmes.

D. — Ceci change toutes les idées reçues sur l’origine du pouvoir, sur sa nature, son organisation et son exercice. Comment croire que ces idées aient pu s’établir partout, si véritablement on doit les tenir pour fausses ?