Page:Proudhon - De la justice dans la Révolution et dans l’Église, tome 1.djvu/509

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D. — Ainsi, à moins d’une révolution dans les idées, toute stabilité politique, toute moralité sociale, toute liberté et félicité pour l’homme et le citoyen, sont impossibles ?

R. — Ce n’est pas seulement l’histoire qui le révèle, ni la Justice et l’égalité qui nous le montrent comme leur inévitable sanction ; c’est la science économique, dans ce qu’elle a de plus élémentaire, de plus positif, de plus réel, qui le prouve. Les forces collectives appropriées, la puissance sociale comprimée, aliénée, le gouvernement oscille de démagogie en despotisme et de despotisme en démagogie, semant les ruines et multipliant les catastrophes, dans des périodes presque régulières.

D. — N’y a-t-il rien de plus à recueillir, pour le philosophe, dans cette étude de la formation, de l’accroissement et de la décadence des anciens États ?

R. — Ils ont été, par leur inorganisme même, la révélation du nouvel état, et comme une embryogénie de la Révolution.

Quel progrès, en effet, quelle idée ne leur devons-nous pas ?

Développement des forces économiques, parmi lesquelles, au premier rang, les forces collectives ;

Découverte de la puissance sociale dans le rapport de toutes ces forces ;

Raison des formes gouvernementales, variables selon la race, le sol, le climat, l’industrie, l’importance relative des éléments constituants, servant à marquer en chaque pays le centre de gravité politique ;

Idée de la solidarité universelle, ou de la force humanitaire, émergeant tantôt de la lutte, tantôt de l’accord des États ;

Idée d’une balance des forces économiques et sociales, essayée sous le nom de balance des pouvoirs ;

Élaboration du droit, expression supérieure de l’homme et de la société ;

Intelligence plus large de l’histoire, à recommencer au point de vue de cette physiologie de l’être collectif ; tant de siècles d’une civilisation négative en apparence, parce qu’elle était ennemie de l’égalité, devenant des siècles d’affirmation, en montrant la genèse et appelant l’équilibre des forces :

Voilà ce qu’au-dessous des révolutions et des cataclysmes