Page:Proudhon - De la justice dans la Révolution et dans l’Église, tome 2.djvu/167

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libre ou fatal, s’il tenait de l’un et de l’autre ; dans le premier comme dans le second cas et dans l’hypothèse de leur conciliation, ce qu’il pouvait en résulter pour la confirmation de l’Évangile et la destinée du genre humain.

L’Église, livrant le travailleur au joug féodal après avoir rompu sa chaîne antique, a continué sous une autre forme l’œuvre du polythéisme. Elle a remplacé la fatalité par la prédestination ; elle a vu naître et mourir les physiocrates sans se douter que ces théoriciens du produit net portassent dans leurs spéculations mercantilistes toute une nichée d’hérésies terribles ; depuis trente ans elle assistait, dormant sur sa chaire, aux débats économiques, lorsque la foudre de 1848 vint la réveiller en sursaut.

Alors elle comprit que là-dessous il se remuait quelque chose dont ses Écritures n’avaient point parlé, que ses Pères n’avaient pas connu, à propos de quoi ses conciles et ses papes n’avaient rien défini : c’était le droit de l’homme et du citoyen, l’égalité devant la loi, la justice économique, le travail libre, la vertu immanente et désintéressée, l’éducation de l’humanité par elle-même, le progrès !… Elle se dit que les portes de l’enfer allaient prévaloir, et par provision elle condamna, elle frappa… Depuis, elle nous a donné pour calmant le dogme souverain de la Conception immaculée, en l’honneur duquel il a été brûlé pour un million de francs de bougies dans toutes les églises de France.

Mais erreur ou ignorance ne fait pas compte ; et franchement, Monseigneur, la Révolution démocratique et sociale, tombant sur l’Église ex abrupto et in promptu, a eu tort de vous saisir ainsi à l’improviste. Remettez-vous donc l’esprit, et après avoir invoqué l’Esprit, dites-nous, là, en termes non équivoques, sans circonlocutions ni ambages, si vous êtes pour le travail libre ou pour la