Page:Proudhon - De la justice dans la Révolution et dans l’Église, tome 2.djvu/199

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célébreront la fête, bien que pas un n’aille à la messe ; et le peuple comprendra, par cet exemple, comment il se peut qu’une religion soit fausse, et le contenu de cette religion vrai, etc. »


Voilà ce que je disais, et ce que l’Église, représentée par M. l’abbé Doney, comme aujourd’hui par messeigneurs Mathieu et Sibour, refusait d’entendre. Au fond, sur quoi portait la divergence ? C’est que la Révolution, que j’évoquais sous le nom de Moïse et à propos de la loi d’égoïsme, tend à la Justice ; tandis que l’Église, attachée au sacrement et à la lettre, reste dans la loi d’amour, dans la charité.

Pouvais-je donc, en bonne logique, traiter la question à un autre point de vue que celui que j’avais adopté, et m’en tenir à la lettre du Pentateuque ? Le bel enseignement à proposer à la bourgeoisie contemporaine que de lui dire, d’après Moïse : Qu’il ne lui est pas permis d’assommer le travailleur, ni de le vendre comme esclave ; que tout bourgeois a droit de cuissage sur sa bonne, et même sur chaque fille du peuple, pourvu qu’il paye ; que le repos du dimanche, ayant été établi par charité, et comme adoucissement à la servitude, n’est obligatoire pour le patron que relativement à ses ouvriers ; que la propriété a pour condition compensatoire le glanage dans les champs, le ratelage dans les prés, le grapillage dans les vignes, le prêt d’argent sans intérêt, etc., etc. !…

C’est alors que l’Académie se serait récriée contre l’impertinence de mes textes, et qu’au lieu de m’accorder, à titre d’estime, la médaille de bronze, elle m’eût dénoncé, comme elle a fait plus tard, à l’indignation des honnêtes gens.

Quittons l’Académie bisontine et mon discours, et revenons à la question.