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En ce qui touche la substantialité et l’organisation de l’être social, j’ai montré la première dans ce surcroît de puissance effective qui est propre au groupe, et qui excède la somme des forces individuelles qui le composent ; j’ai donné la loi de la seconde, en faisant voir qu’elle se réduit à une suite de pondérations des forces, des services et des produits, ce qui fait du système social une équation générale, une balance.

En tant qu’organisme, la société, l’être moral par excellence, diffère donc essentiellement des êtres vivants, en qui la subordination des organes est la loi même de l’existence. C’est pourquoi la société répugne à toute idée d’hiérarchie, ainsi que le fait entendre la formule : Tous les hommes sont égaux en dignité par la nature, et doivent devenir équivalents de conditions par le travail et la Justice.

Or, telle est l’organisation d’un être, telle sera sa raison : c’est pourquoi, tandis que la raison de l’individu affecte la forme d’une genèse, comme on peut le voir par toutes les théogonies, les gnoses, les constitutions politiques, la syllogistique ; la raison collective se réduit, comme l’algèbre, par l’élimination de l’absolu, à un système de résolutions et d’équations, ce qui revient à dire qu’il n’y a véritablement pas, pour la société, de système.

Ce n’est pas un système, en effet, dans le sens qu’on attache ordinairement à ce mot, qu’un ordre dans lequel tous les rapports sont des rapports d’égalité ; où il n’existe ni primauté, ni obédience, ni centre de gravité ou de direction où la seule loi est que tout se soumette à la Justice, c’est-à-dire à l’équilibre.

Les mathématiques forment-elles un système ? Il ne tombe dans l’esprit de personne de le dire. Si dans un traité de mathématiques quelque trace de systématisation se décèle, elle est du fait de l’auteur ; elle ne vient point