Page:Proudhon - De la justice dans la Révolution et dans l’Église, tome 2.djvu/452

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distinction des sexes et du mariage, dont elle fait son organe ; que de plus elle est le principe unique de toute félicité publique et individuelle : donc elle existe.

Comme objet de la connaissance, la faculté juridique, ou plus simplement la Justice, réunit tous les genres de certitude : certitude de raison et certitude de fait, certitude de conscience et certitude d’habitude. Elle a pour elle l’entendement, le sens intime, la théologie, la fable, l’histoire, la pratique, les sens, tout ce qui compose la réalité humaine, collective et individuelle, physique et animique, idéelle et phénoménale. Nulle part, ni dans le monde de la nature, ni dans celui de l’esprit, ne se rencontre un pareil concours de témoignages. Elle est affranchie même de ce scepticisme invincible, révélé par Kant, qui désolait l’âme de Jouffroy, et qui, portant sur l’absolu divin, extérieur à l’homme, tombe devant la Justice, expression de l’absolu humain, à qui, d’après Descartes et Kant, il est défendu de douter de lui-même.

XI

La double preuve de la réalité de la Justice faite, et je rappelle que je la fais à la manière de Descartes, en m’appuyant, non plus sur une hypothèse transcendantale ou un postulé tiré de la nécessité sociale, mais sur le témoignage direct et les manifestations fonctionnelles de la conscience, tirons-en, toujours à la manière de Descartes, les conséquences anti-théologiques.

Si je possède la notion du bien, et si je le nomme, en un mot si je le pense, cela veut dire tout à la fois que je le fais et que je le suis, attendu, d’un côté, que penser c’est fonctionner, c’est faire, c’est être ; de l’autre, que ma pensée ne pouvant être séparée de moi, le produit de cette pensée est nécessairement mien, ce qui veut dire