Page:Proudhon - De la justice dans la Révolution et dans l’Église, tome 2.djvu/485

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au fond autre que celle de Dieu, doivent se relever de leur misère et tendre vers le souverain bien : théorie de la réhabilitation qui n’a rien à envier à celle des orthodoxes. Je ne ferai pas la critique de ce double mouvement, l’un qui exprime, si j’ose ainsi parler, l’irradiation des âmes hors de l’infini ; l’autre, leur rentrée dans l’infini. Je prends le système tel quel, avec toutes les corrections qu’on y voudra faire : il reste toujours que pour opérer ce retour il faut supposer dans le système, partout présente, une force de réaction égale à l’action. Je demande quelle est cette force. L’action, c’est la nécessité : Spinoza le démontre. Quel nom veut-il que je donne à la réaction, dont il suppose l’homme capable ?

« Dans les propositions qui précèdent, dit-il, j’ai réuni tous les remèdes des passions, c’est-à-dire tout ce que l’âme, considérée uniquement en elle-même, peut contre ses passions. Il résulte de là que la puissance de l’âme sur les passions consiste : 1o dans la connaissance même des passions ; 2o dans la séparation que l’âme effectue entre telle ou telle passion et la pensée d’une cause extérieure confusément imaginée ; 3o dans le progrès du temps, qui rend celles de nos affections qui se rapportent à des choses dont nous avons l’intelligence supérieures aux affections qui se rapportent à des choses dont nous n’avons que des idées confuses ; 4o dans la multitude des causes qui entretiennent celles de nos passions qui se rapportent aux propriétés générales des choses ou à Dieu ; 5o enfin, dans l’ordre où l’âme peut disposer et enchaîner ses passions. La puissance de l’âme se détermine uniquement par le degré de connaissance qu’elle possède, et son impuissance ou sa passivité par la seule privation de connaissance, ou par ce qui fait qu’elle a des idées inadéquates ; d’où il résulte que l’âme qui pâtit le plus est l’âme qui est constituée dans la plus grande partie de son être par des idées inadéquates, et, au contraire, l’âme qui agit le plus est celle qui est constituée dans la plus grande partie de son être par des idées adéquates. » (Éthique, liv. v, prop. 20, scholie ; trad. de M. Saisset.)