Page:Proudhon - De la justice dans la Révolution et dans l’Église, tome 2.djvu/506

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C’est à peine si la philosophie, d’après la moins justifiée de ses hypothèses, la Justice transcendantale, ose nous dire libres ; et déjà elle tremble que cette liberté ne cause du vacarme là-haut ! Eh ! philosophes du bon Dieu, connaissez-vous vous-mêmes, vous en saurez toujours assez de l’Autre.

XXVIII

M. Renouvier, répondant dans la Revue philosophique et religieuse à M. Lemonnier, a très-bien fait valoir contre son adversaire, qui d’ailleurs l’accordait, la faculté qu’a l’homme d’agir sur lui-même, de s’efforcer, de tâcher, de s’éduquer ; faculté qui est précisément celle que suppose Spinoza, et dont il rend compte au moyen des idées adéquates. Mais la spontanéité n’est pas encore la liberté ; puis M. Renouvier, bien qu’on ne puisse guère lui reprocher de religion, admet encore un certain absolu cosmique qui a gâté sa défense, de sorte que la controverse est restée sans résultat.

Si tout est aussi bien lié dans l’univers que les philosophes modernes, à l’exemple de Leibnitz, inclinent à le penser, il est impossible de voir dans la liberté autre chose qu’un rouage, c’est-à-dire une non-liberté ; et quand M. Renouvier, qui admet en principe cette liaison, prétend ensuite, pour le besoin de sa cause, introduire dans l’ordre universel, parfait, des possibles, des exceptions, des nouveautés, il peut se tenir pour assuré que sur ce terrain il ne sera pas suivi. Des exceptions aux lois éternelles de l’univers ! un règne des possibles, en dehors du règne des réalités ! une faculté donnée à l’âme spécialement en vue de ces exceptions et de ces possibles !… On aura beau le faire aussi petit qu’on voudra, ce prétendu règne, enfermer les exceptions dans une sphère si étroite qu’elles ne gâtent rien à l’ensemble : l’inconséquence ne