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Code civil. Art. 1er. Les lois sont exécutoires du jour de leur promulgation.

Art. 2. La loi ne dispose que pour l’avenir et n’a point d’effet rétroactif.

Code pénal. Art. 4. Nulle contravention, nul délit, nul crime, ne peuvent être punis de peines qui n’étaient pas prononcées par la loi avant qu’ils fussent commis.


De telles maximes, il faut l’avouer, au point de vue d’un ordre éternel, immuable, supérieur à l’homme, à qui il ne resterait que d’y conformer sa volonté, sont scandaleuses, immorales. Elles changent totalement la notion de loi, en faisant de la loi non plus le rapport ou la raison des choses, mais le statut arbitral de la volonté de l’homme. Pour être dans le vrai, le législateur, théiste, panthéiste, fataliste ou optimiste, devrait dire :

« Toute loi de la nature, c’est-à-dire tout rapport naturel et nécessaire des choses, est loi pour l’homme, et cela seul est loi.

« Or, le rapport des choses étant invariable, à quelque époque que surgisse le débat, ce rapport oblige, indépendamment de la connaissance de l’homme et de son acquiescement.

« Donc, tout litige sera réglé, tout crime ou délit réprimé et réparé d’après la loi des choses : le libre arbitre n’a rien à y voir, la société rien à redire.


Pourquoi donc le législateur procède-t-il d’une façon contraire ? Pourquoi pose-t-il la loi comme sienne, acte de sa volonté pure, prescrit de son bon plaisir et commandement de son autorité ?

Ah ! c’est que la liberté est supérieure au monde et à ses lois, et qu’elle ne peut être tenue de faire état de ces lois qu’autant qu’elle s’y est engagée vis-à-vis d’elle-même par un libre serment.

Voilà pourquoi, dans la question des bulletins électoraux, la Cour de cassation, généralisant là où le texte de la loi n’avait fait que spécifier, fut irréprochable quant