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nité aux âmes, apaisé tous les amours-propres. Rome affirmant elle-même, par la bouche de son poëte, de son héraut, le Droit et l’Idée, associant les nations à sa fortune, la protestation nazaréenne devenait impossible. La mort ne l’a pas voulu. Aussi bien la civilisation, troublée dans sa marche et déjà en décadence, ne pouvait plus se reconstituer par des voies régulières. Rendons du moins cette justice à Virgile, d’avoir au dernier moment protesté contre le crime de lèse-humanité dont son œuvre allait le rendre solidaire. Son sacrifice, en nous révélant sa grande âme, achève de nous révéler son génie et ajoute à sa gloire.


CHAPITRE VI.

De la littérature dans ses rapports avec le progrès et la décadence des nations. — Suite.

XLIX

Maintenant, un nouveau progrès dans la littérature est-il possible ?

Cette question revient à demander si l’esprit qui anime les sociétés peut engendrer un nouveau cycle littéraire, supérieur au cycle de Virgile comme celui-ci l’avait été au cycle d’Homère.

Car, nous le savons, l’esprit humain ne peut ni se répéter ni rétrograder ; il avance, ou il s’éteint.

Or, le droit ne s’arrête pas, le droit, motif supérieur de tout idéal. La notion de Justice, qui a monté d’Homère à Virgile, n’a certes pas rétrogradé depuis Virgile jusqu’à nous. Quant à la gnose, en dépit des religionnaires dont la faconde, plus que la foi, nous obsède, elle s’est transformée ; elle a nom aujourd’hui la Science.