Page:Proudhon - De la justice dans la Révolution et dans l’Église, tome 3.djvu/329

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est le patron d’une confrérie qui embrasse tous ceux sur lesquels l’Église a prononcé le conjungo, la doublure de l’Hyménée, son bon génie, sa fortune. Si le mari peut se vanter de quelque avantage, ce sera, tout au plus, d’une vaine et douteuse priorité.

J’ai connu un jeune marié qui, sur les exhortations de son confesseur et l’avis des commères, s’étant avisé de passer blanches les trois premières nuits de ses noces, fut dans l’intervalle coiffé par sa femme, dont un galant avait surpris le secret, et qui ne put soutenir le ridicule de sa position. N’eût-il pas mieux valu pour cet imbécile, pour sa femme, pour l’avenir du jeune ménage, qu’il fît dès le premier jour une libation à la déesse Pertunda, au lieu de méditer sur l’amour mystique et les gloires de l’Immaculée ?

XLVI

L’amour a son principe dans l’organisme et vit d’idéal : à ce double titre, il est soustrait au libre arbitre. Puis donc que la loyauté, l’honnêteté, sont absentes du commerce permis, se trouveraient-elles par hasard dans la contrebande ? Ces hommes à bonnes fortunes, ces femmes galantes, ces petites filles coquines, toute cette chevalerie errante, en pleine révolte contre la loi, comment est-elle dans ses amours clandestins ? Sans doute nous retrouverons chez de libres amants cette vertu, cette honorabilité si rare entre époux légitimes. Nous avons vu le mariage, considérons le libertinage.

Le sentiment le plus ordinaire qu’éprouve le chrétien pour la femme qui, hors mariage, s’est donnée à lui, est un mépris indéfinissable doublé d’aversion ; et ce mépris, cette aversion, la chrétienne les rend à son complice, dont elle n’attend ni estime ni miséricorde. La promesse ou le regret du mariage étant le prétexte,