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l’autre à appliquer à deux ordres d’idées positives et empiriques le concept de l’absolu.

Dieu, en effet, n’est-il pas l’idéal de l’être, de la puissance, de la sagesse, de la Justice ? Le ciel n’est-il pas l’idéal de la terre ; la béatitude, l’idéal de notre bien-être ; Satan, l’idéal du péché ; l’enfer, l’idéal du remords ; Christ, l’idéal de la miséricorde ; Marie, l’idéal de la pureté ?

De quelque côté qu’on la prenne, la théologie est une construction de l’idéal, non pas seulement conçu, mais réalisé dans un autre monde.

XXIV

Cette réduction opérée, reste à déterminer, vis-à-vis des autres termes de la série, l’importance de l’idéal.

Le premier mouvement, on ne peut en douter, est de lui accorder la première place.

L’idéal étant l’apogée de l’idée que nous nous faisons de l’objet, une représentation de cet objet, non pas adéquate, mais élevée, en bien ou en mal, en beau ou en laid, jusqu’à l’absolu, on voit de suite comment l’idéal a été pris pour type et modèle des choses, comment en conséquence il est devenu une règle de conduite et un critère du jugement. Rien de plus logique, au premier coup d’œil. Quand le géomètre trace une figure, quand le marchand pèse ou mesure sa marchandise, quand le juge prononce sa sentence, bien que chacun ait la certitude que ni la figure exécutée ne peut être parfaitement exacte, ni la mesure ou balance parfaitement juste, ni le jugement parfaitement irréprochable dans sa teneur, tous trois cependant se réfèrent à un certain idéal de forme, d’exactitude et de Justice, qui leur sert de type et dont ils approchent le plus près possible.

Il y a encore une raison de cette prépondérance accordée à l’idéal.