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ÉGYPTE : ART TYPIQUE

de son époque. Il n’a rien lu, il ne demande point à rien lire : ni Voltaire, ni Rousseau, ni Dupuis, pas plus que le docteur Strauss ou M. Renan. Philosophes, théologiens, artistes lui font également pitié. Sans avoir rien appris, il hante peu l’église. Esprit positif et pratique, comme le Martin de Candide, il a perdu la foi au ciel et l’estime du clergé. Ce n’est pas lui qui risque de s’égarer dans les rêveries du piétisme et les sublimités de l’idéal ; il va droit au fait et à la chose ; c’est le réalisme fait chair. Qui travaille prie ! je ne sais qui lui a soufflé à l’oreille que ce mot était du Nouveau Testament ; il se l’est tenu pour dit. A la vue des saints hommes en goguette, devant ce foudroyant contraste entre la spiritualité présomptueuse du ministre de l’autel et la réalité bachique de son existence, il est pris d’un rire fou ; et ce rire, dont l’implacable rusticité vous choque, n’en est pas moins communicatif ; impossible, après quelques minutes d’examen, de s’y soustraire. L’homme le plus grave, le plus indulgent, le moins porté à la satire, comparant le prêtre tel que le veut son institution avec ce que le fait la fatalité d’une existence contradictoire, ne peut s’empêcher de penser que le bon Dieu, en instituant le sacerdoce pour le blanchiment des consciences, a voulu se donner la comédie. Quant à la femme du paysan, dominée par les enseignements de son enfance, fidèle au divin amour, mais douloureusement affectée par ce