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ÉGYPTE : ART TYPIQUE

liaire ; il reçut en conséquence de la pensée générale qui le réclamait une vigoureuse impulsion. Mais, borné à des généralités ethnographiques et métaphysiques, abstrait et disciplinaire plutôt qu’esthétique, il n’était susceptible, malgré sa longue efflorescence, que d’un développement limité. Il convenait, je le répète, à un pays, à une race, à une période ; il ne pouvait devenir universel, perpétuel. Par son inflexible uniformité et sa tradition immobiliste, il était condamné à mourir.

L’art grec se donna pour mission de représenter les dieux, non plus seulement par des types intelligibles à l’esprit, mais en personne, sous des traits visibles et véritables : c’est-à-dire que les Grecs aspirèrent à représenter la beauté surnaturelle, absolue. On dit le type grec pour dire la forme la plus régulière, la plus noble, la plus idéale du visage humain. On devrait dire le type divin ; car s’il y eut en Grèce, peut-être plus qu’ailleurs, de beaux hommes et de belles femmes, à coup sûr ils étaient loin, en masse, de ressembler à leurs dieux, comme les Égyptiens ressemblaient, en masse, au type représenté par leurs artistes. Ce que la statuaire grecque contenait de vérité venait donc bien moins de la fidélité au type ethnique que d’un certain besoin des âmes, tourmentées par l’idéal, et qui voulaient dès cette vie contempler les dieux comme ils étaient, face à face, sicuti erant, facie ad faciem. Ce type divin une fois révélé par la comparaison des plus beaux