Page:Proudhon - Idée générale de la Révolution au dix-neuvième siècle.djvu/252

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faisaient jadis les physiocrates, la participation de la commune ou de l’État au produit net. On veut que ce produit net soit l’impôt. Et de tout cela on conclut à l’inféodation, à l’emphytéose perpétuelle, irréméable de la terre, et ce qui est plus grave, à la non-circulation, à l’immobilisme de toute une catégorie, la plus considérable par sa masse, la plus précieuse par sa solidité, de capitaux.

Cette doctrine me paraît fausse, contraire à toutes les notions de la science, et en l’état dangereuse.

1o Ce qu’on appelle produit net, en agriculture, n’a d’autre cause que l’inégalité de qualité des terres : sans cette inégalité, il n’y aurait pas de produit net, puisqu’il n’y aurait pas de comparaison. Si donc quelqu’un a droit de réclamer contre cette inégalité, ce n’est pas l’État, ce sont les laboureurs mal partagés : c’est pour cela que dans notre projet de liquidation nous avons stipulé sur toute espèce de culture une redevance proportionnelle, destinée à former entre les laboureurs la compensation des revenus et l’assurance des produits.

2o Les professions industrielles, en faveur desquelles on semble réserver une rente foncière, n’ont pas plus que l’État le droit d’y prétendre : la raison, c’est qu’elles n’existent point à part et indépendamment du travail agricole, elles en sont un démembrement. Le laboureur cultive et récolte pour tous : l’artisan, le commerçant, le manufacturier, travaille pour le laboureur. Dès que l’industriel a reçu le prix de sa marchandise il est payé ; son compte est réglé ; il a reçu sa part du produit net comme du produit brut du sol. Faire supporter exclusivement au laboureur sous prétexte de produit net, l’impôt public, c’est créer une immunité au profit des industrieux, et les faire