Page:Proudhon - La Révolution sociale démontrée par le coup d’État du 2 décembre.djvu/168

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couvre l’avenir de ce chef, dont la destinée est désormais inséparable de celle de la patrie. Et telles sont nos conjectures sur cet inquiétant avenir.

« Bonaparte est volontaire, au delà de toute volonté. Impatient du frein, il ne souffre aucun partage de pouvoir, aucune contestation d’autorité. Il s’est révélé dès sa première campagne, par sa résistance aux ordres du Directoire ; dans la campagne d’Egypte, entreprise sous la seule garantie de son nom et de ses desseins ; et finalement dans la manière dont il a quitté son armée pour venir à Paris, général désobéissant et fugitif, s’emparer du gouvernement.

» Tout vice, a dit un philosophe, provient de niaiserie : tout despotisme procède de faiblesse d’esprit. Bonaparte, volontaire et dominateur, étranger aux grandes études, n’a pas de génie politique. Elevé a l’école militaire, habitué à la vie des camps, incomparable dans le commandement des armées, il croit que le peuple se mène comme le soldat. Il est, par ses idées, incapable de présider aux destinées d’un état. Son intelligence, merveilleuse pour l’exécution, a besoin d’une autorité qui le dirige, et il repousse tout conseil, il répugne à toute autorité. Loin de devancer son siècle, il connaît à peine son époque ; il n’en saisit ni le véritable esprit, ni les tendances secrètes. Jacobin avec Robespierre, modéré sous le Directoire, il a suivi avec la fougue de son caractère le flux et le reflux de la révolution. Aujourd’hui premier consul, il prend son mandat, a l’instar des plus infimes praticiens, pour une substitution de ses vues, qu’on suppose immenses, aux nécessités pratiques de la situation et