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aux premiers temps de la production humaine, sont un corrélatif du gouvernement et du culte, une des formes de l’initiation primitive. De même que l’homme ne s’est originairement discipliné que par la terreur religieuse et la crainte du pouvoir, il ne s’est livré au travail que forcé et contraint. Pour obtenir de lui un labeur quotidien, il a fallu le soumettre à une retenue quotidienne : au fond, la rente et l’intérêt ne sont que les instruments de cette éducation énergique.

Actuellement, le peuple de nos villes et de nos campagnes, dont la moyenne de salaire est de 41 centimes par jour et par tête ; ce peuple était-il capable de supporter, sans tomber dans la crapule et l’insolence, une part plus forte de richesse ? Était-il à craindre, qu’en augmentant son bien-être, au lieu de doubler son activité et de le faire monter dans la vertu, on ne le précipitât dans la fainéantise et le vice ? Fallait-il, de plus en plus, le tenir en bride par un rude labeur, un maigre salaire, et comme l’avaient pratiqué sur eux-mêmes le Christ, les apôtres, les moines du moyen âge, ne laisser d’espérance au prolétaire que dans une autre vie ?

Poser ces questions, c’était les résoudre. La difficulté, pour le Gouvernement provisoire, n’était pas dans le but, elle était dans le moyen. Comment garantir le travail, ouvrir le débouché, équilibrer la production et la consommation, augmenter le salaire, attaquer la rente et l’intérêt, sans faire disparaître le crédit et arrêter la formation des capitaux ?… L’émancipation du prolétariat se présentait à certains esprits comme la dépossession de la bour-