Page:Proudhon - Les Confessions d'un révolutionnaire.djvu/211

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La raison de cette impuissance, c’est, comme l’on va voir, d’une part, que les prescriptions socialistes introduites dans la Constitution sont incompatibles avec les attributions politiques ; d’un autre côté, que la tendance du gouvernement est de ramener toujours, quelque chose que l’on fasse, la centralisation à un terme unique, je veux dire de résoudre les pouvoirs constitués dans l’absolutisme.

Et ce ne sont pas les partis qu’il faut accuser de ces contradictions : elles sont le produit naturel des idées et du temps. Le gouvernementalisme datait de l’éternité ; il était en majorité dans l’Assemblée, nul ne pouvait avoir la prétention de l’exclure. Quant au Socialisme, il existait dans les esprits longtemps avant la convocation de la Constituante et la Révolution de Février ; il devait, même sans représentants, se produire officiellement, comme besoin de l’époque et conséquence de la révolution. Louis-Philippe serait resté sur le trône, que le même mouvement, qui s’est accompli par sa chute, se fût accompli sous son autorité.

Trois choses forment la partie socialiste du nouveau pacte :

1. La déclaration des droits et des devoirs, dans laquelle se trouve, à défaut et comme indemnité du droit au travail, le droit à l’assistance.

2. L’idée de progrès, de laquelle est sorti l’article 111, qui établit pour le pays la faculté perpétuelle de révision.

3. Le suffrage universel, dont l’effet, encore inaperçu, mais inévitable, sera de changer de fond en comble le droit public, en supprimant le gouvernement.

Or, je dis que ces éléments, dans lesquels il convient de voir une expression incomplète, déguisée, de la Constitution sociale, sont par eux-mêmes incompatibles avec tout gouvernementalisme ; que, de plus, là où les pouvoirs auront été séparés, il est inévitable que de telles déclarations deviennent pour eux un sujet perpétuel de division et de conflit.