Page:Proudhon - Systeme des contradictions economiques Tome 2, Garnier, 1850.djvu/204

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ternelle est, dans ce cas, remplacée par la prévoyance sociale. Et c’est ce qui doit être : pour l’enfant, la protection de la famille ; la protection de la société pour l’homme. » Oui, changez…, faites que…, remplacez par la prévoyance sociale la prévoyance paternelle ! Si je ne vous avais lu, je vous attendrais à l’œuvre. Quel malheur aussi que vous ne puissiez remplacer encore le travail des individus par le travail de l’état ! quelle calamité que l’état ne puisse, à la place des particuliers, se marier, faire des enfants, les nourrir et les pourvoir ! Mais que dis-je ? Le travail libre et la production des enfants par des couples ne sont-ils pas choses naturelles, et l’hérédité chose de convention !

Mais que répondrez-vous à ce père, qui vient vous dire : Lorsque je fait mon testament, je ne le fais pas seulement pour ceux que j’institue mes héritiers, je le fais aussi pour moi. L’acte de mes dernières volontés est une forme par laquelle je continue à jouir de mes biens après que j’ai cessé de vivre, une manière de rester dans la société que je quitte, une prolongation de mon être parmi les hommes. C’est le lien de solidarité qui m’unit à mes enfants, qui rend entre nous les affections, les obligations communes. Vous me vantez votre prévoyance, en échange de laquelle vous me demandez mon bien. Je compte plus sur moi-même que sur un fondé de pouvoirs. Vous avez trop de soins pour penser à tout et en temps utile : d’ailleurs, je ne vous connais pas. Qui donc êtes-vous, vous qui vous appelez l’état ? qui vous a vu ? où demeurez-vous ? quelles garanties sont les vôtres ? Ah ! vous ressemblez au dieu de vos prêtres, vous promettez le ciel, à condition qu’on vous donne la terre. Montrez-vous donc enfin, montrez-vous une fois dans votre sagesse et votre souveraine puissance !…

L’abolition de l’hérédité procède, comme toutes les rêveries républicaines, de cette idéologie absurde qui consiste à remplacer partout l’action libre de l’homme par la force d’initiative du pouvoir, l’être réel par un être de raison, la vie et la liberté par une chimère dont la triste influence a été la cause de presque toutes les calamités sociales.

« L’abus des successions collatérales est universellement reconnu, continue M. Blanc ; ces successions seront abolies, et les valeurs qui les composent déclarées propriétés communales. »

Mais, pour abolir les successions collatérales, il faut commencer par abolir la propriété : sans cela je vous défie de