Page:Proudhon - Systeme des contradictions economiques Tome 2, Garnier, 1850.djvu/284

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année, à la convenance du gouvernement, la fraction, augmentée d’un dixième, du travail collectif qui peut m’être assignée, et je demande en retour à devenir libre, à mes risques et périls, et à travailler seul. »

Ce citoyen, venant demander l’émancipation du travail et s’obligeant à payer la dîme de la liberté, serait-il déclaré suspect ? La liberté individuelle devrait-elle être proscrite au nom de la liberté générale, laquelle se compose de la somme des libertés individuelles ? Quel serait le motif de cette proscription ? Liberté, charme de mon existence, sans qui le travail est torture, et la vie une longue mort ! c’est pour loi que l’humanité combat dès l’origine, c’est pour ton règne que nous sommes en travail de cette nouvelle et grande révolution. Ne serais-tu donc que la mort de la conscience sous le despotisme de la société ; et, par peur de te perdre, faudra-t-il chaque jour que je t’immole ?

Dira-t-on que la liberté du travail ne se peut accorder, parce qu’elle implique l’appropriation, et avec l’appropriation, le monopole, l’usure, la propriété, l’exploitation de l’homme par l’homme ? — Je réplique aussitôt que si la liberté engendre ces abus, c’est faute d’une loi d’échange, faute d’une constitution de la valeur et d’une théorie de répartition qui maintienne entre les consommateurs l’égalité, entre les fonctions l’équilibre. Or, qui est-ce qui s’oppose ici à la répartition ? qui est-ce qui repousse de toutes ses forces la théorie de la valeur et la loi de l’échange ? le communisme. En sorte que le communisme repoussse la liberté du travail, parce qu’il lui faudrait une loi de répartition, et rejette ensuite la répartition, afin de conserver la communauté du travail : quel galimatias !

Organisation du travail, division ou liberté du travail, séparation des industries ; tous ces termes sont synonymes. Or la communauté périt par la séparation des industries ; donc la communauté est essentiellement organique, elle ne peut exister, elle ne renaîtra sur la terre que par la désorganisation. Car comment concevoir une séparation des industries qui ne sépare pas les industrieux, une division du travail qui ne dise pas les intérêts ? Comment sans responsabilité, et par conséquent sans liberté individuelle, assurer l’efficacité du travail et la fidélité du rendement ? Le travail, dites-vous, sera divisé ; le produit seul sera commun. — Cercle vicieux, pétition de principe, logomachie, absurdité. J’ai prouvé tout à l’heure que le travail ne pouvait être divisé