Page:Proudhon - Systeme des contradictions economiques Tome 2, Garnier, 1850.djvu/313

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de subsistances, pourrait facilement doubler tous les vingt-cinq, et même tous les dix-huit ans.

Say raccourcit encore cette période : il trouve que la population, si rien ne la réprimait, triplerait tous les vingt-six ans.

M. Rossi exprime la même idée dans cette élégante formule : « Si un produit deux, et que les nouveaux produits aient chacun la même force productive qu’avait la première unité, deux produiront quatre, quatre produiront huit, et ainsi de suite. Abstractivement parlant, Malthus posait donc un principe incontestable »

A côté de ce premier fait, désormais hors de doute, Malthus en pose un autre, non moins certain : c’est que, tandis que la population tend à s’accroître selon la progression géométrique :—: 2. 4. 8. 16. 32. etc., la production des subsistances augmente seulement selon la progression arithmétique 1. 2. 3. 4. 5. 6. etc. ; ce qui mène invinciblement à cette conclusion, qu’en tout pays une partie de la population périt incessamment faute de pain.

Malthus ayant prétendu qu’il suffisait que cette seconde proposition fût énoncée pour qu’elle parût immédiatement démontrée, et, s’étant dispensé en conséquence d’en faire la preuve, je vais suppléer à son silence en montrant comment a progression arithmétique des subsistances 1. 2. 3. 4... est le corollaire de la progression géométrique de la population 2. 4. 8. 16. 32. 64...

A quoi tient la génération d’un homme ? à l’émission d’un germe, émission que le géniteur est incessamment excité à permettre, qui n’exige de lui aucun effort, qui tout au contraire est le bien suprême de sa vie, le but de son travail, le besoin de sa destinée. Mais jusqu’au jour où il sera capable de pourvoir par lui-même à sa subsistance, ce germe coûtera, pour frais d’incubation, allaitement, nourriture, etc., pendant une période de dix, quinze, vingt et même vingt-cinq ans, 12, 15, 20 et même 50 pour 100 de ce que consomment ses auteurs. Or, admettant que le même couple conduise à bien quatre, six, dix ou douze enfants, il s’ensuit, avec une évidence mathématique et sans qu’il soit besoin de dresser une statistique immense, de compulser les récits des voyageurs et de fouiller les chroniques, que le bien-être de ces époux diminuera par la raison même qui devait y mettre le comble, de 12, 15, 20, 30, 50 et même 80 pour 100.

Et comme chacun des enfants, à peine sorti de l’école et dé-