Page:Proudhon - Systeme des contradictions economiques Tome 2, Garnier, 1850.djvu/380

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Cas de stérilité, veuvages, retards dans le mariage,
accidents, interruptions
1.5
Morts avant l’âge nubile (le chiffre dépasse
aujourd’hui de beaucoup 50 p. 100)
2.5
Célibataires 0.5
------
4.5

La population n’augmentant ainsi que d’un dixième par chaque période d’environ 30 ans, le doublement aurait lieu en trois siècles.

Mais le nombre des naissances tend continuellement à décroître, et la période de doublement à s’allonger pour deux raisons : 1° l’abréviation de la période de fécondité par l’augmentation incessante du travail et le développement des nouvelles mœurs ; 2° le nombre croissant des célibataires.

Il n’est pas vrai, dans l’ordre de la société, que tous les hommes soient prédestinés au mariage et à la paternité, bien que tous le soient à l’amour. C’est un privilège de l’homme de pouvoir vivre, par le seul développement de la vertu et sans perte pour l’amour, dans une parfaite virginité. Aussi la folie amoureuse qui tourmente notre génération une fois passée, le nombre des vierges, de ceux, dit l’Évangile, qui se castraverunt propter regnum cœlorum, doit augmenter tous les jours ; et si l’on demande quels sont ceux qui, ayant la faculté du mariage, consentiront aux sacrifices du célibat, je réponds sans hésiter : Ceux-là même qui aujourd’hui vivent dans le libertinage. Le célibat, vicié dans ses motifs et dans ses causes, redeviendra honorable et pur : telle est la loi des contraires, loi qui pour nous est la parole même du Destin.

Le christianisme a eu le pressentiment de cet avenir lorsqu’il a exalté la virginité au-dessus de toutes les vertus, et qu’il en a fait une obligation pour ses prêtres. En cela, comme en tant de choses, le christianisme a été prophétique : c’était la spontanéité sociale qui, à l’instigation du peuple, s’exprimait par la bouche des papes, en attendant que la réflexion parlât elle-même dans les écrits des philosophes. Le christianisme a produit l’idée de l’amour chaste, du véritable amour ; il a conçu la femme, non point comme l’associée ni l’égale de l’homme, mais comme partie indivise de la personne humaine, os ex ossibus meis, et caro ex carne meâ. Il a distingué l’amour conjugal des autres amours, alors que l’Indien le confondait avec l’amour fraternel, que l’Arabe le ravalait au