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Page:Proudhon - Théorie de l impôt, Dentu, 1861.djvu/365

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et d’improductivité. Un fait minime, mais caractéristique, le démontre.

« J’ai vu, dit J.-B. Say, les mémoires du berceau du roi de Rome, offert en don par la ville de Paris, dont les magistrats étaient nommés par le prince. Ils se montaient à 201,874 fr. 97 cent. » Ainsi faisait-on jadis pour les Dauphins, considérés à tour de rôle comme de petits messies, à qui le pauvre peuple devait offrir l’or, l’encens et la myrrhe.

Ce qu’il y a de curieux dans ces offrandes aux premiers-nés des empereurs et des rois, c’est qu’on les adresse invariablement à tout héritier présomptif de la couronne, de quelque race et lignée qu’il soit (voir la chanson de Béranger, les Deux cousins) ; c’est en second lieu que, pour peu que la critique s’en mêle, les offrandes s’arrêtent tout à coup : il n’y a plus personne qui ose prendre sur soi de grever de ces coûteux joujoux le budget des communes et de l’État. On se souvient des fameux pamphlets de Timon sur la liste civile, et de la peine qu’eut la famille d’Orléans à arracher à la parcimonie des Chambres une dotation pour ses princes. La liste civile elle-même diminue ou augmente selon que le gouvernement est plus ou moins sincèrement représentatif : en 1789, on sépare les dépenses du prince de celles de l’État, et les frais de la suprême magistrature s’abaissent jusqu’à la Convention, pour se relever ensuite avec le Consulat et l’Empire ; plus tard, en 1830, en passant de la légitimité à la quasi-légitimité, la liste civile tombe de 25 millions à 12 ; à l’avénement de la république, elle n’est plus que de 1,200,000 fr. ; le rétablissement de l’empire la reporte à 25 millions. La cause de ces variations, je le répète, n’est ni l’amour ni la haine ; c’est tout simplement la différence des systèmes.

« Une nation, dit fort bien J.-B. Say, a, comme un particulier, des besoins réels et des besoins factices ; et elle est d’autant mieux gouvernée qu’on pourvoit aux pre-