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DE L’IMITATION.

PARAGRAPHE XII.

Que ce qu’il y a de fictif et d’incomplet dans chaque art, est précisément ce qui le constitue art, et devient le ressort même du plaisir de l’imitation.

Dès que, par la loi de nature, un art ne peut être autre chose qu’une manière de saisir et de présenter un seul des aspects du modèle universel, rien de plus vain que tous les efforts de l’artiste pour donner à son image un surcroît de vérité ou un supplément de ressemblance pris hors de la sphère de son imitation. De quelque façon qu’il emprunte, et de quelque part qu’il tire ses ressources, soit par des mélanges de genre, soit par des complications de ressorts, soit par l’affectation d’une fidélité identique, soit par toutes les transpositions physiques ou morales du règne de la réalité dans celui de l’imitation, l’erreur est la même, et son résultat sera par-tout semblable. Ce qu’on croit ajouter à la vertu imitative, est précisément ce qui la détruit, et en ce genre aussi le mélange des éléments les neutralise.

Oui, c’est précisément ce qu’il y a de fictif et d’incomplet dans chaque art, qui le constitue art. C’est de là qu’il tire sa principale vertu et l’effet de son