Page:Quevedo - Don Pablo de Segovie.djvu/40

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para un lavement, appela une vieille tante, âgée de soixante et dix ans, qui lui servait d’infirmière, et lui dit de nous donner de bons clystères.

On commença par Don Diégo, qui ne défit point sa culotte, qu’il avait déjà mise, et la vieille, au lieu de lui insérer le remède dans le corps, le poussa entre la chemise et l’épine du dos jusqu’à l’occiput, de sorte que ce qui devait servir d’émollient en dedans devint un bain pour le dehors. Le jeune homme poussait des cris affreux. Cabra survint, et comme il le vit dans cet état, il ordonna de me donner l’autre remède, en ajoutant qu’on retournerait ensuite à Don Diégo.

Je m’habillais dans ce même moment ; mais cela ne me servit à rien. Cabra et d’autres me tinrent, et la vieille me donna le lavement, qu’en revanche je lui renvoyai tout sur la face. En vain Cabra se fâcha et me menaça de me chasser de chez lui, prétendant qu’on reconnaissait bien que tout cela n’était qu’un jeu de ma part. Je ne fus pas assez heureux pour qu’il me tînt parole.

Nous ne réussîmes pas mieux dans les plaintes que nous portâmes à Don Alonzo. Cabra fit entendre qu’elles ne provenaient que de notre peu d’amour pour l’étude, et par là il les rendit inutiles. Ayant renvoyé son domestique, pour lui avoir trouvé un vendredi matin quelques miettes de pain dans les poches de son habit, il chargea sa vieille tante de faire la cuisine et de servir les enfants. Dieu sait ce que nous eûmes à souffrir avec cette vieille !