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AVERTISSEMENT.

Les poëtes de la France forment une grande partie de sa gloire littéraire. Les ouvrages des plus illustres sont entre les mains de toutes les classes de la société ; des spectateurs de toutes les conditions écoutent avec admiration les beaux vers récités sur la scène. Dès l’âge de cinq ans, soit dans la famille, soit dans les pensions, soit même dans les petites écoles, les enfants apprennent par cœur les fables de la Fontaine et celles de Florian. Corneille, Boileau, les deux Racine, J. B. Rousseau, Voltaire, sont étudiés dans les colléges et dans toutes les maisons d’éducation.

Cependant les règles de notre versification sont généralement ignorées. On voit dans la poésie la même chose que dans la prose, les pensées et l’expression ; l’on néglige la partie technique. On sait que nos vers sont rimés, et l’on n’a aucune idée des règles de la rime. On croit, on sent même qu’ils ont une cadence, et l’on ne pourrait dire ce qui produit cette cadence. On se tromperait même sur le nombre de syllabes qu’il faut attribuer à une foule de mots. Or cette ignorance, honteuse dans celui qui a parcouru la carrière des études classiques, est encore regrettable dans celui qui n’a pu fréquenter les colléges. Comme la lecture des poëtes n’appartient pas exclusivement aux personnes qui ont reçu une instruction supérieure, il importe à des conditions plus modestes d’apprendre aussi comment se construisent nos vers, et nous ne voyons pas de développement à l’instruction primaire qui soit d’un intérêt plus général.

L’étude du mécanisme de notre versification convient à l’instituteur ; car l’instituteur est appelé à conquérir par