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DU MANGEUR D'OPIUM

mon frère à ce doux ermite, pour le confier à un homme mondain, actif, le véritable antipode quant au caractère.

À quel titre le personnage pouvait-il se dire lettré ; je n’ai jamais eu le moyen d’en juger, et considérant qu’à l’heure présente, s’il vit encore, après trente-six ans écoulés, ce doit être un homme à tête grise, je respecterai son âge au point de taire son nom. Il appartenait à une catégorie qui disparaît chaque année, et de plus en plus rapidement, je l’espère. Dieu soit loué, du moins sur ce point, si important pour la dignité de l’homme, parmi tant d’autres projets de réformes, défendus par quelques-uns de nous, ou destinés peut-être, en dépit de l’appui de l’opinion, à tomber dans le domaine des chimères, ce point, dis-je, a enfin été établi de manière à ne pouvoir être anéanti, affaibli, oublié.

À mesure que l’homme devient plus intellectuel, la faculté de le diriger par sa nature intellectuelle et morale, et le plus absolu mépris pour tout recours à ses seuls instincts d’animal capable de souffrance physique, sont deux choses qui marchent de pair. Et si l’on devait chanter dans les nations en toutes langues un Te Deum, un O jubilate pour chaque progrès, chaque victoire définitive que remporte la nature humaine dans sa lutte actuelle contre le mal, l’erreur, oui, sans en excepter


Le contrat ensanglanté que déchirent toutes les nations,


c’est-à-dire l’abolition du commerce des esclaves, à mon avis, il faudrait célébrer par une fête publique la suppression des châtiments brutaux, di-