Page:Quinet - Œuvres complètes, Tome VII, 1857.djvu/164

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
162
NAPOLÉON.

Je monterais, à demi nue,
Sur les vagues, puis sur la nue,
Puis avant l’aube dans le ciel ;
Puis je dirais à l’Éternel
Le nom qui remplit mon oreille,
Et dans mon songe me réveille.

Je ne suis pas l’oiseau de mer
Ni la feuille verte en hiver,
Ni l’étoile dans la nuit noire.
Je ne suis rien qu’un chant de gloire ;
Je veux monter jusqu’à demain
Les degrés de ma tour d’airain,
Pour voir le long chemin qui mène
Du pont d’Arcole à Sainte-Hélène.

Avec l’écho, sans m’arrêter,
D’un vol bruyant je veux monter
Sur le seuil de mille royaumes,
Sur leurs tombeaux, sur leurs fantômes,
Sur les pins frissonnants d’Eylau,
Et sur l’orme de Waterloo ;
Puis, au faîte, battre de l’aile,
Comme en son nid une hirondelle.

Peuple de France, écoute-moi !
Et dans ton cœur relève-toi !
Suspends un moment ton ouvrage,
Écoute-moi, malgré l’orage ;
Comme un pèlerin du désert
S’arrête au bruit de la tourmente,
Et du chamelier qui se perd
Écoute le chant sous sa tente.