Page:Régnier - Escales en Méditerranée.djvu/57

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d’argent ou de cuivre qu’on lui jette et qu’elle rattrape en plongeant. Cependant comment être à Naples sans aller faire visite aux boutiques où l’on vend de l’écaille et du corail ? Ne faut-il pas se pourvoir au moins de quelques breloques cornues contre le mauvais sort, en ce pays de la jettatura ? Et puis comment résister à l’appel des beaux bronzes antiques du Musée qui, des retraites souterraines d’où on les a tirés, semblent avoir conservé la sombre couleur de l’Erèbe et dont la chair de métal a des reflets luisants comme si elle avait été baignée dans les eaux infernales du Styx ? Nous voici donc, errant dans la poussière des rues de Naples. Malgré les larges percées qu’on y a opérées les vieux quartiers offrent encore des aspects pittoresques. Aux jeux de la lumière les antiques et sordides masures se transforment et prennent des airs de fête, toutes pavoisées et empourprées de loques et de haillons. À l’angle de deux rues on fait cercle autour de chanteurs ambulants. Plus loin c’est un marché avec ses étalages de légumes et de fruits. Dans cette ruelle, des ménagères s’activent auprès des cuisines en plein vent, ce qui est une façon de parler, car pas un souffle n’anime l’atmosphère brûlante. Où trouver un peu de fraîcheur ? Entrons à Santa-Chiara qui garde les tombeaux des rois d’Anjou, à