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je revoyais, vif et nu, lançant au loin sa petite mule verte, comme une offrande ironique à la lune marine du hublot.


15 juin. Sorrente. — Nous avons passé toute une semaine à Naples, puis, comme il faisait très chaud dans le port et qu’une forte odeur de soufre empestait l’air, nous sommes venus chercher ici un peu de fraîcheur.

L’Amphisbène est ancré devant la plage qui porte le nom comique de Cocumella. De là, nous partirons demain ou après-demain, pour continuer notre voyage. Notre prochaine escale, un peu longue, sera Palerme. Aujourd’hui, je vais passer la journée à revivre notre semaine napolitaine. À Naples, donc, nous avons mené une vie de promenades et d’excursions. Mme Bruvannes, les Subagny, Gernon y ont pris part assez souvent. Quant à Antoine, il n’est descendu à terre qu’une fois. Il se plaint et se lamente toujours. Cependant je trouve que son état s’améliore. Dans cette seule promenade qu’il a faite, il m’a demandé de l’accompagner. Il était à peu près cinq heures du soir. Sur le quai, nous avons pris une de ces voitures cahotantes que décore le titre pompeux de « carozella » et dont le cheval porte au frontail une plume de faisan. Dans cet équipage nous avons fait un tour à travers la ville, conduits par un grand escogriffe qui faisait claquer furieusement son fouet.