Page:Régnier - L’Illusion héroïque de Tito Bassi, 1917.djvu/81

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étonné, le bon abbé, s’il s’était douté de ce qui se passait dans la cervelle du grand garçon que j’étais devenu, car j’atteignais mes dix-sept ans et j’étais formé comme un homme. Mais rien ne décelait dans mes dehors les agitations intérieures auxquelles j’étais livré. Je montrais dans mes manières et dans mes paroles beaucoup de calme et de bonhomie et nul n’eût deviné, quand je gravissais, gravement et posément, les pentes agrestes du Monte Berico, les yeux baissés et quelque livre sous le bras, que ce jeune pédant, tout farci de latin, qui s’en allait sous les ombrages méditer son Virgile ou son Cicéron, avait le cœur tout bouillant d’exploits et la cervelle hantée de mille chimères.

Le Monte Berico était ma promenade favorite ; j’en préférais la solitude aux rues de Vicence où je m’étais aperçu parfois que ma présence provoquait des regards empreints de quelque moquerie. Parfois, sur mon pas-