Page:Régnier - La Cité des eaux, 15e éd.djvu/192

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Voir la torche éclatante au poing que l’ombre cache.
Contemple, qu’elle fuie ou qu’elle dorme, l’eau,
Qu’elle soit source ou fleuve et fontaine ou ruisseau,
Jusqu’à ce que s’étire ou se réveille en elle
La Naïade natale et la Nymphe éternelle.
Observe si longtemps le pin, l’orme ou le rouvre
Que le tronc se sépare et que l’écorce s’ouvre
Sur la Dryade nue et qui rit d’en sortir !
L’univers obéit à ton vaste désir.
Si ton âme est farouche et pleine de rumeurs
Hautaines, tu verras dans le soleil qui meurt,
Parmi son sang qui coule et sa pourpre qui brûle,
Le bûcher toujours rouge où monte encor Hercule,
Lorsque tressaille en nous, en un songe enflammé,
La justice pour qui son bras fort fut armé.
C’est ainsi que dans tout, le feu, l’eau, l’arbre, l’air,
Le vent qui vient du mont ou qui va vers la mer,
Tu trouveras l’écho de ce qui fut divin,
Car l’argile à jamais garde le goût du vin ;
Et tu pourras, à ton oreille, entendre encore
La Sirène chanter et hennir le Centaure,
Et, quand tu marcheras, ivre du vieux mystère
Dont s’est paré jadis le passé de la terre,
Regarde devant toi ce qui reste de lui