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LA TRACE


La terre fut docile à ton double métier,
L’argile au médailleur et la glaise au potier,
Mais ton labeur est vain de façonner encore
Et la hanche de l’urne et le flanc de l’amphore
Et de gonfler la panse et d’amincir le col.
Que tes mains sans regret laissent choir sur le sol
Le vase rouge et noir où ta pointe figure
Sur la courbe rondeur que le feu rendra dure
Un entrelacement de feuilles et de fruits !
Que te sert, au bûcher qui flambe dans la nuit,
Debout et sans repos jusqu’à l’aube, d’attendre
L’heure mystérieuse et froide de la cendre
Pour l’enfermer dans l’urne au lieu d’offrir au vent
Ce que la Mort, hélas ! a laissé d’un Vivant ?
Laisse le lait couler, en blanc flot, des mamelles
Aux bouches sans baisers qui sont faites pour elles,
Pourquoi vouloir rendre captifs le vin ou l’eau ?
Pourquoi veux-tu donner longuement pour tombeau